Discours 2022 Chemins de la Mémoire à Aime La Plagne
Au nom de tous les organisateurs je tiens à exprimer une
pensée pour les anciens résistants qui nous ont quitté, depuis la
dernière édition des Chemins de la Mémoire : Marcel Rochaix,
Paul Linossier, Jean Blanc et Raymond Bertrand. Ils nous avaient
accompagnés sur cette manifestation à de nombreuses reprises,
utilisant leurs dernières parcelles d’énergie pour rencontrer les
écoliers de Savoie malgré la fatigue due à leur âge.
Merci aux enseignants et parents accompagnateurs. Votre
présence et votre implication dans la préparation de vos élèves
sont une récompense pour les organisateurs qui voient ainsi la
valorisation de leur travail.
A vous les enfants, qui avez marché, lu, écouté, nous
espérons que cette journée vous apporte les repères qui serviront à
construire votre bagage de citoyens.
Gardez en souvenir de cette journée, le sort de Pierre
Ducognon,18 ans, lâchement abattu par un soldat il y a 78 ans
dans la forêt juste au dessus de nous. L’instituteur de Granier,
cadre de la Résistance locale, qui fut proche de sa famille, en a
gardé la blessure jusqu’à la fin de ses jours. Un an après ce drame
il écrivait dans un discours d’hommage : « en ce jour de victoire
notre joie est amère car il y a 11 mois tu tombais sous les balles
nazies. Que tes parents, tes grands parents, ta famille acceptent
que nous prenions part à leur douleur que nous savons
immense. »
Cet exemple vous signifie que la guerre n’est pas, et ne sera
jamais, une belle aventure. Les soldats et les civils tués à la guerre
ne reviennent pas à la vie comme dans les jeux vidéos. Mourir à
18 ans, c’est ne pas vivre la plus belle partie de son existence.
Alors, quoiqu’il arrive dans votre vie future, ne vous laissez pas
fasciner par les armes, ne vous laissez pas éblouir par des exploits
guerriers souvent exagérés.
Nous honorons aujourd’hui celles et ceux qui se sont
engagés pour leur pays et en chasser l’occupant, mais cet
engagement était motivé aussi par la défense des valeurs de la
République. Liberté, Égalité, Fraternité, sont trois mots très
importants, faites attention à ne pas en oublier un seul.
Pour comprendre la fraternité gardez en souvenir le parcours
tourmenté de deux filles juives, Alice et Rachel Perelstein. Elles
ont dû se cacher dans les villages qui se trouvent autour de nous :
de St Marcel à la mine de La Plagne en passant par Montfort.
Celles et ceux qui ont permis de les sauver des camps de la
mort où leurs parents ont été exécutés, sont restés très discrets sur
cet épisode de mars 1944. Pourtant il n’y avait rien à regretter dans
les choix qu’ils ont faits. Au départ était l’institutrice qui a caché
Alice dans un tonneau, à l’arrivée des soldats dans la cour de
l’école. Ensuite s’est organisée dans la Résistance la chaîne de
solidarité qui a permis aux deux sœurs de se cacher et survivre
jusqu’à la fin de la guerre. On appelle ces personnes qui ont permis
aux juifs d’échapper aux rafle mortelles« les justes ». Elles sont
peu connues pour ces actions, elles sont pourtant l’honneur de
notre pays.
Dans le temps qui vient, ce sera à vous de choisir la bonne
solution dans des situations difficiles. Vous devrez peut être
décider de votre comportement face à la barbarie, à la persécution,
au racisme et à la violence. Alors soyez les justes de demain.
Pierre Duc 17 juin 2022
